Le défi de la transition vers les études collégiales ou professionnelles pour les jeunes autistes ou qui ont un TDAH
Paru le 12 septembre 2016
Par Émilie Robert, conseillère d'orientation
Auteure du livre Les personnes autistes et le choix professionnel – Les défis de l’intervention en orientation (2015), publié chez Septembre éditeur
C’est la rentrée scolaire pour un grand nombre de jeunes au Québec. Pour ceux qui entreprennent des études collégiales ou professionnelles, cette période correspond, en quelque sorte, à la transition vers la vie adulte. Il y a quelques mois, ces jeunes étaient encadrés par l’instruction obligatoire des études secondaires, et les voilà maintenant responsables de leur projet de vie. Sont-ils prêts à vivre cette transition? Qu’en est-il des jeunes ayant un trouble neurologique qui affecte le développement de compétences associées à la maturité, comme les jeunes autistes ou ceux ayant un trouble déficitaire de l’attention (TDAH)?
On peut comprendre pourquoi la transition vers les études postsecondaires pose un défi pour ces jeunes. Ils doivent faire plus d’efforts que les autres pour gérer leur temps et répondre aux nouvelles exigences des études postsecondaires. En plus, la plupart d’entre eux ont bénéficié dans le passé d’un encadrement rigoureux de la part d’un éducateur spécialisé, d’un travailleur social et de leurs parents, souvent très présents dans leur vie. Ces adultes les aidaient à s’organiser et à se rappeler des choses importantes comme : « As-tu parlé à ton professeur de tes difficultés à comprendre les lectures? », « N’oublie pas que tu as un devoir à remettre. », « N’oublie pas que tu as un rendez-vous avec le psychoéducateur aujourd’hui. » Maintenant qu’ils sont « dans la grande école », cette aide disparait soudainement, car les parents n’ont plus accès au dossier scolaire de leur enfant et la majorité des services d’un éducateur cessent à la fin des études secondaires.
Comment s’organiser pour bien réussir sa première session d’études collégiales ou professionnelles?
Bien entendu, ce n’est pas parce qu’il a des difficultés à organiser ses tâches et ses priorités et à exprimer ses besoins que le jeune autiste ou ayant un TDAH n’a pas de contrôle sur le développement de ses habiletés.
La première étape dans le développement de nouvelles compétences est d’avoir la collaboration de l’adulte qui l’accompagne dans son quotidien afin que cette personne accepte de demeurer disponible, tout en étant moins présente. Le jeune autiste aura besoin d’être rassuré comme quoi il ne sera pas laissé à lui-même dans cette transition remplie de nouveautés. Cependant, ne pas le laisser s’organiser l’empêche d’avoir des occasions de pratiquer sa nouvelle autonomie. Le jeune ayant un TDAH, au contraire, aura peut-être hâte d’avoir du « lousse », mais comme il a tendance à être impulsif, il sera bon de rester présent. Le parent (ou l’éducateur) et le jeune peuvent prendre entente en début de session sur les aspects qui relèveront maintenant du jeune et les autres actions qui continueront d’être assumées par l’adulte.
De plus, le jeune autiste aura besoin de trucs pour gérer lui-même son anxiété. Il pourra bénéficier de scénarios sociaux (petits récits préparés en compagnie d’un adulte) qui racontent comment se comporter dans une situation potentiellement stressante. Par exemple, le jeune peut apprendre la phrase suivante : « Si je n’arrive plus à trouver mon local de classe au cégep, je reste calme, je marche tranquillement vers le bureau de la sécurité près de la porte principale et je demande calmement de l’aide pour trouver mon local. »
Par ailleurs, le jeune ayant un TDAH aura intérêt à prévoir des moments d’activité physique afin d’évacuer le trop-plein d’énergie. Aux études postsecondaires, les cours sont plus longs et l’enseignement est souvent plus magistral. Il y a moins de périodes de récréation et d’éducation physique. La pratique d’une activité physique régulière le soir ou lors de l’heure du dîner favorisera une meilleure concentration.
L’usage d’un agenda, qu’il soit papier ou électronique, s’avérera un outil indispensable. Alors que les enseignants au secondaire rappellent souvent aux élèves leurs devoirs, leurs leçons et les dates d’examens, c’est beaucoup moins fréquent aux études postsecondaires. Le jeune devra choisir un format d’agenda qui lui plait, y inscrire dès la première semaine de cours les dates importantes du calendrier scolaire (ex. : dates limites d’abandon de cours, remises de travaux, etc.) et utiliser des sonneries (si l’agenda est électronique) afin de ne rien oublier.
Enfin, l’entrée aux études postsecondaires est l’une des plus grandes transitions que le jeune aura vécues. Il est fortement recommandé de consulter les services d’aide de l’établissement scolaire afin de s’assurer qu’un orthopédagogue ou qu’un conseiller en services adaptés, bien que moins présent qu’au secondaire, puisse lui venir en aide dans les moments difficiles. Ce professionnel pourra non seulement lui octroyer des mesures d’aide, comme du temps supplémentaire pour les examens, mais également intervenir lorsque le jeune fera face à un problème et le diriger vers les bonnes ressources.
Comme le dit le dicton : « Tirer sur la carotte ne la fera pas pousser plus vite! » Il ne faut donc pas s’attendre à ce qu’un jeune ayant des besoins particuliers devienne autonome et responsable du jour au lendemain. La transition vers les études collégiales ou professionnelles est toutefois l’occasion de l’amener à développer de nouvelles compétences qui lui serviront durant toute sa vie d’adulte.