La personne conseillère en orientation, bien plus qu’une source d’information sur l’emploi ou la formation pour les jeunes adultes
Paru le 25 janvier 2021
Par Julie Chabot, étudiante à la maitrise en orientation à l’Université de Sherbrooke, auxiliaire de recherche et membre étudiante au Centre d'études et de recherches sur les transitions et l’apprentissage (CÉRTA)
La période de vie dans laquelle se trouvent les jeunes adultes est caractérisée par de nombreuses transitions importantes telles que la fin des études, l’insertion dans un premier emploi, la décohabitation de chez les parents, le début d’une vie de couple et la parentalité [1]. Pour certains d’entre eux, notamment ceux qui sont sans diplôme et en situation de précarité, il arrive qu’ils vivent ces transitions à un âge plus précoce que les autres [2]. Conséquemment, le contexte dans lequel s’inscrit leur recherche d’information sur l’emploi ou la formation peut varier et teinter leur besoin informationnel.
Par leur expertise sur le plan de l’information sur la formation et le travail (IFT ou ISEP), les personnes conseillères en orientation sont toutes désignées pour accompagner ces jeunes adultes dans leur parcours d’insertion socioprofessionnelle. Néanmoins, avec les personnes en situation de précarité et présentant certaines vulnérabilités face à l’emploi (peu ou pas diplômées, problème de santé mentale, situation de handicap), le besoin d’information peut sortir du champ de l’orientation.
Intervenir en emploi dans un contexte plus large
En effet, étant donné que les problèmes personnels peuvent exercer une influence sur l’insertion professionnelle [3] et le maintien en emploi de ces jeunes adultes, il peut être important d’aborder le contexte dans lequel s’inscrit la démarche afin d’éviter de leur faire vivre des échecs qui pourraient les fragiliser davantage. À cet égard, les personnes conseillères d’orientation détiennent les compétences pour évaluer la situation et l’influence de l’environnement dans lequel se situent leurs personnes clientes afin d’« aménager les conditions concrètes et les ressources nécessaires à la mise en place de l’intervention » [4].
L’orientation : une expertise multifacette
Plus largement, leur champ d’exercice démontre bien leur expertise multidimensionnelle misant à la fois sur l’évaluation du fonctionnement psychologique, des ressources personnelles et des conditions du milieu de la personne et touche autant les besoins d’orientation, d’insertion professionnelle que d’aide psychosociale. De plus, il faut rappeler que les personnes conseillères en orientation sont parmi un nombre limité de personnes professionnelles habilitées à évaluer des populations vulnérables face à l’emploi dans le cadre d’activités qui leur sont réservées [5].
Une personne de confiance
Au-delà de cette expertise multidimensionnelle, il importe aussi que les personnes conseillères mettent en place un bon lien de confiance avec ces jeunes adultes en situation de précarité afin de les inciter à partager leurs besoins d’information excédant la sphère vocationnelle [6]. Établir ce lien de confiance peut être complexe avec certains jeunes adultes en situation de précarité. Selon Hébert et Lanctôt [7], il importe de prêter attention au nombre de personnes professionnelles qui interviennent auprès d’un même jeune adulte. Il peut être difficile pour ce jeune de vivre l’instabilité d’un changement de personnes intervenantes [7].
Miser sur la polyvalence pour éviter la multiplication d’intervenants
Conséquemment, bien qu’elle puisse comporter des avantages pour certaines clientèles, la fragmentation des services auprès de ces personnes présente des inconvénients. En effet, un changement de personne intervenante en raison d’une évolution du besoin de départ est susceptible d’entrainer du découragement chez ces jeunes adultes. Cela met en évidence l’importance de déléguer un nombre minimal de personnes professionnelles au soutien d’un même jeune adulte en situation de précarité. Par leur expertise multidimensionnelle, les personnes conseillères en orientation peuvent être assignées à de jeunes adultes en situation de précarité afin de répondre à plusieurs de leurs besoins dans l’étendue de leur champ d’exercice.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
[1] Galland, O. (2011). Sociologie de la jeunesse (5e éd.). Paris, France : Armand Colin.
[2] Osgood, W.D., Ruth, G., Eccles, J. S., Jacobs, J. E. et Barber, B. L. (2005). Six paths to adulthood. Dans R.A. Settersten Jr., F.F. Furstenberg Jr. et R.G. Rumbaut (dir.), On the frontier of adulthood. Theory, research, and public policy (p. 320-355), Chicago: The University of Chicago Press.
[3] Carron, C., Ecoeur, Y., et La Thune, S. (2003). La réinsertion : entre obstacles sociaux et problèmes personnels. Gouvernement du Québec, ministère de la Santé et des Services sociaux : Dépendances, 20, 22-23.
[4] Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec (2010). Le profil des compétences générales des conseillers en orientation. Montréal : OCCOQ. http://orientation.qc.ca/files/Profil-de-comp%C3%A9tences-des-conseillers-et-conseill%C3%A8res-d%E2%80%99orientation-du-Qu%C3%A9bec.pdf
[5] Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec (2010-2021). Formation et permis d’exercice. Montréal : OCCOQ. https://www.orientation.qc.ca/informations-pour-le-public/le-conseiller-dorientation/formation-et-permis-dexercice
[6] Supeno, E. et Mongeau, V. (2015). Horizon informationnel sur la formation et le travail chez de jeunes adultes non diplômés en situation de précarité. Nouveaux cahiers de la recherche en éducation, 18(1), 114-136.
[7] Hébert, S., & Lanctôt, N. (2016). Les adolescentes placées en centre de réadaptation : regard sur l’instabilité à travers l’étude de leurs parcours de placements. Revue de psychoéducation, 45(1), 63-85.