Bien connaitre sa personnalité pour mieux s’orienter

Paru le 17 avril 2020

Bien connaitre sa personnalité pour mieux s’orienter
 
Par Andréanne Roy, étudiante à la maitrise en orientation à l’Université de Sherbrooke
 
 
Que ce soit dans le cadre d’un processus d’embauche, d’un processus de counseling de carrière ou simplement pour approfondir leur connaissance de soi, plusieurs personnes sont amenées à passer des inventaires de personnalité. En effet, la personnalité est l’une des caractéristiques psychologiques les plus évaluées par les conseillers et les conseillères d’orientation [1]. Or, en quoi l’évaluation de la personnalité est-elle pertinente sur le marché du travail? Cet article vise à présenter la théorie de la personnalité la plus validée scientifiquement et à exposer l’importance d’effectuer des choix de carrière congruents avec ses traits de personnalité.
 
La personnalité est composée d’un ensemble de traits stables qui reflètent les modes de comportements, de pensées et de sentiments qui distinguent les individus [2]. Puisque les traits de personnalité sont relativement stables dans le temps et dans différentes situations, ils permettent de mieux comprendre la façon dont une personne va s’adapter à son environnement, notamment en emploi [3]. 
 
La théorie des traits de personnalité la plus utilisée et validée empiriquement est le modèle à cinq facteurs [4]. Selon ce modèle, la personnalité est composée de cinq grands traits universels sur lesquels les individus diffèrent quantitativement : stabilité émotionnelle, extraversion, ouverture, agréabilité et consciencieux.
 
Les personnes ayant un niveau élevé de stabilité émotionnelletendent à demeurer calmes en cas de stress, sont confiantes et moins enclines à vivre des émotions négatives comme la tristesse, l’anxiété et la colère [5]. En effet, ces personnes gèrent habituellement bien la pression liée à un emploi exigeant et supportent mieux la critique que les personnes moins stables émotionnellement. À l’opposé, les personnes ayant une faible stabilité émotionnelle vont préférer un emploi moins stressant et dans lequel elles sont moins exposées au jugement des autres. Cependant, il est possible que ces personnes développent des stratégies qui leur permettent de surmonter ces difficultés; malgré un trait de stabilité émotionnelle plus bas, une personne peut développer sa capacité à gérer ses émotions négatives. 
 
L’extraversionest caractérisée par la sociabilité, le leadership et la recherche de stimulation [6]. Les individus plus extravertis tendent à avoir un réseau social plus large que celui des personnes introverties, qui sont plutôt calmes, réservées et qui préfèrent la solitude [6]. Il est donc souhaitable pour une personne extravertie d’occuper un poste nécessitant d’entretenir plusieurs relations avec autrui, tel qu’il est le cas, par exemple, dans le domaine de la vente. 
 
Les personnes dont l’ouvertureà l’expérienceest élevée sont particulièrement curieuses et créatives. Elles aiment la stimulation intellectuelle et par les sens (par l’art ou la musique par exemple), cherchent à vivre de nouvelles expériences et détiennent une bonne tolérance face à l’inconnu [6]. À l’opposé, les personnes moins ouvertes à l’expérience sont davantage réalistes, conservatrices et pratiques [6]. Ces dernières préfèreront d’ailleurs occuper un poste où leurs fonctions sont bien définies et plus prévisibles [7], alors que les personnes plus ouvertes se déploieront mieux dans des emplois non routiniers nécessitant de résoudre des problèmes et d’être créatives.
 
Le trait agréabilitéindique une propension à être altruiste, bienveillant et à faire confiance aux autres [6]. À l’opposé, les personnes dont ce trait est moins élevé préfèrent la compétition, plutôt que la coopération, et ont tendance à être plus méfiantes et individualistes [6]. Les personnes à l’agréabilité élevée performent mieux dans des emplois où elles doivent travailler en équipe et entretenir des relations interpersonnelles significatives [7]. Plus particulièrement, elles vont préférer travailler et se sentir davantage compétentes dans des emplois liés au service à la clientèle et à la relation d’aide [7]. 
 
Le trait consciencieuxréfère à la recherche de réussite, la discipline et la méticulosité [6]. Les personnes consciencieuses préfèrent les emplois qui nécessitent de porter attention aux détails, de suivre des consignes claires, de persévérer et de relever des défis [6]. De plus, le trait consciencieux constitue le meilleur prédicteur de la performance en emploi. À l’opposé, les personnes peu consciencieuses préfèrent improviser plutôt que de suivre un horaire strict [6] et ont tendance à avoir davantage de comportements contreproductifs en emploi [9].
 
Pour conclure, bien connaitre sa personnalité permet de faire un choix professionnel plus éclairé, en adéquation avec ses caractéristiques personnelles [8]. D’ailleurs, les personnes travaillant dans un environnement congruent avec leur personnalité sont plus enclines à être satisfaites en emploi et démontrent un niveau d’engagement considérablement plus élevé [7]. Bien sûr, un bon choix de carrière ne se limite pas uniquement à la considération de ses traits de personnalité. En effet, il doit prendre en compte d’autres caractéristiques psychologiques, telles que les intérêts, les valeurs et les aptitudes, ainsi que les ressources personnelles de la personne, telles que sa formation et ses expériences. 
 
Si vous ressentez le besoin de faire le point sur votre carrière, vous pouvez trouver un conseiller ou une conseillère d’orientation œuvrant pour un service public ou en pratique privée (https://www.orientation.qc.ca). Il pourra ainsi vous aider à déterminer les caractéristiques importantes à prendre en compte pour vous permettre de faire un choix de carrière éclairé.
 
 
[1] Dorceus, S., Le Corff, Y., Yergeau, É., Savard, R. et Gingras, M. (2014). Les pratiques des conseillers d’orientation du Québec en matière d’évaluation psychométrique dans les écoles secondaires : Dimensions évaluées, tests utilisés et exercice des activités réservées par le projet. L’orientation scolaire et professionnelle43(2), 1-19. doi: 10.4000/osp.4354 
 
[2] Morizot, J. et Miranda, D. (2007). Approche des traits de personnalité : Postulats, controverses et progrès récents. Revue de psychoéducation36(2), 363‐419.
 
[3] Pervin, L. A. et John, O. P. (2005). Personnalité : Théorie et recherche. Saint-Laurent : Éditions du renouveau pédagogique inc.
 
[4] Plaisant, O., Guertault, J., Courtois, R., Réveillère, C., Mendelsohn, G. A. et John, O. P. (2010). Histoire des « Big Five » : OCEAN des cinq grands facteurs de la personnalité. Introduction du Big Five Inventory français ou BFI-Fr. Annales Médico-psychologiques, revue psychiatrique,168(7), 481‐486. doi: 10.1016/j.amp.2009.04.016
 
[5] Muldoon, J., Kisamore, J. L., Liguori, E. W., Jawahar, I. M. et Bendickson, J. (2017). Moderators of the personality-performance relationship: An investigation of job meaning and autonomy. Personnel Review46(3), 474-489.
 
[6] McCrae, R.R. et Costa, P. T. (2016). Les inventaires de personnalitéNEO. Manuel professionnel (Trad. Par Y. Le Corff). Montréal : Institut de recherches psychologiques (1eréd. 2004).
 
[7] Barrick, M. R. et Mount, M. K. (2005). Yes, personality matters: Moving on to more important matters. Human Performance18(4), 359‐372. doi: 10.1207/s15327043hup1804_3
 
[8] Boudrias, J.-S. et Morin, D. (2011). Démystifier les inventaires de personnalité. Gestion36(3), 61-73. doi: 10.3917/riges.363.0061
 
[9] Helle, A. C., DeShong, H. L., Lengel, G. J., Meyer, N. A., Butler, J. et Mullins-Sweatt, S. N. (2018). Utilizing five factor model facets to conceptualize counterproductive, unethical, and organizational citizenship workplace behaviors. Personality and Individual Differences135, 113-120. doi: 10.1016/j.paid.2018.06.056